12 novembre 2008

12 novembre 1935

Il écrit pour de faux, comme lorsqu’il dormait sur ses cahiers de classe Clairefontaine à grands carreaux. Dans ses oreilles, depuis 3 minutes et 37 secondes, résonne la mélodie d’un passé dont il a brulé les derniers clichés numériques. Elle : sa main alanguie sur son épaule, la couleur de ses yeux le soir au bord du lit, le son de sa voix lorsqu’elle dit ses premiers mots au réveil. Tout ceci existe encore dans son cerveau peut-être inutilement entier. La blessure morte cause une douleur vive. Rien qu’une ablation du lobe préfrontal ne puisse régler.

Il songe à cette libération au bistouri électrique, imagine le viol de sa boite crânienne qui s’ouvre en croustillant comme une chips de pomme de terre, et visualise les dernières pensées s’envolant avec la section des connexions nerveuses de sa matière grise. Un jus rose comme du pamplemousse enduit la lame du chirurgien et il s’extasie devant la beauté de la couleur de sa chair cérébrale. Ou peut-être ne sait-il même plus reconnaitre une couleur ? Sentir un fruit ? Ecouter une chanson ?
Et ainsi, par-delà ce qu’il lui plairait de croire, sa raison humblement se rappelle à lui : douleur et plaisir sont nécessairement les revers d’une même médaille.