29 avril 2012

Aubépines



whom do i speak to?
a stranger walking in the dark
climbing his mountain
ever waking at the foot of his bed

***

i see them around me:
actors perform, businessmen do
writers compose and presidents chew.
artists are

***

parts of me are disappearing in a flood of light
data piles on and my memories are no more
i wish i didn't remember loosing what i held

***

the tallest building is no more than a grain of rice
once you remove all its empty space
like a spinning wheel seems to be a ball
before it rests again
the illusion isn't what we see but its name
we're not matter, just energy,
waves, nuclear forces weak and strong,
invisible poetry moving the strings along

***

i went to see her
but she wasn't there
i passed in front of a statue
slowly moving and breathing air
i left as i didn't know what to say
never will i again
dream on a sunday

*** 

the poet walks still
sits around
hears silence
and speaks with his mouth shut

23 avril 2012

mayday

C'était le temps où l'on mettait des petites barrières entre nos courses sur le tapis roulant de la caisse au supermarché, pour éviter toute possibilité de partager, même pour un instant, un morceau d'espace avec un inconnu. 

Seule la musique parvenait encore à me donner le sourire. Et la bouffe, encore que là, ça relevait davantage de l'addiction.

Maybe I'll just get out in the shade.
Maybe I'll just egg out in the shell.

En prenant le métro je voyais de tout, mais rien qui ne me fasse envie. Elle, tiens. Parce qu'elle avait une boucle d'oreille dans le nez et un trou dans son jean délavé, il aurait fallu que je la trouve originale, "rebelle" ? Moi, tout ce que ça m'inspirait, le conformisme effarant de son style et de ses attitudes, son adhésion pathétique et sans remise en question à une pseudo contre-culture d'une uniformité presque touchante dans sa naïveté, c'était d'arrêter de vivre. Puisque rien ne semblait plus avoir de valeur, que même ceux qui pensait s'opposer ne voulait pas voir l'ironie de leur démarche (s'opposer à quelque chose, ça reste le prendre en référent, pour être original ça se pose là), autant en finir. 

Et puis évidemment il y avait le pendant de cette vérité, celui qui m'obligeait à regarder en face ma propre conformité au système établi, mon incapacité à penser en dehors, à m'en extirper. Se voir dans la glace en regardant des êtres qu'au mieux on méprise, merci bien…

Le soir, superposition des pensées, double-écriture sur la piste-mémoire. Un laser musical grave des pensées humides aussitôt épongées sur le front de la conscience. Demain, aucune trace n'en subsistera - nous serons à nouveau séparés.

Au bar, les bouteilles vides s'entassent dans des cartons éventrés par l'humidité et les jets incessants de cadavres.

Navigation difficile dans la salle à moitié vide entièrement remplie par leurs égos. 

Plus loin, attente primaire devant les commodités incommodes, répétition en longueur des vexations physiologiques ranimant d'autant plus férocement ces besoins que nous sommes venus satisfaire. 

Pourtant, au creux d'une nuit pareille à toutes les autres, moment suspendu : contact, toucher, chaleur. Eternité relative d'une étreinte amicale portant les vibrations diffuses de l'affection portée à ceux qui ne sont pas là pour la recevoir, ou à qui l'on ne peut pas avouer.

Signal de détresse, perdu dans les limbes éthyliques, il est toujours 4 heures et le rideau tombe sur nos illusions. Étincelle de lucidité vite éteinte, qui contient comme dans un big bang personnel l'intégralité de nos peines et nos joies, impossible à envisager dans leur intégralité. 

Medley de sentiments, mayday bleu.

On se conforte dans nos songes quand on peut - ils sont parfois plus cruels que la réalité dans leur façon de mettre devant nos mains tendues l'objet de notre désir pour le retirer au matin venu. Je ne peux pas croire qu'on se fasse volontairement du mal, alors quoi, ces moments volés à la réalité nous rendent-ils plus heureux, nous évitent-ils de devenir fou, ne serait-ce que pour "rendre la réalité supportable en entretenant en nous quelques folies" ? 

Toute la volonté du monde ne saurait convaincre l'autre de suivre sincèrement la notre. 

Alors l'eau salée sur nos joues.

5 avril 2012

Les Couleurs Noires


I watched you walk down the stairs as if it were the aisle. (20/03 17.33)

Cette note était la partition définitive.

Ce fût la plus grande fête, la joie la plus radieuse. Collision simultanée de milliards de symphonies visuelles et auditives dont les fragments forment aujourd'hui toute matière et son contraire, et dont l'écho colore encore le tissu spatio-temporel primordial. 

Le film que nous voyons depuis se dérouler "à l'endroit" joue en réalité à rebours.

De ce sommet, le cours de toute existence descendrait dans un désordre exponentiel, sorte de rivière aux mille deltas détournée au hasard d'explosions donnant quelques couleurs éphémères au vide absolu.

Ces flashs, nous les nommerions vies.
De sa cigarette une ombre s'échappe en répandant un parfum de nuit. (15/10 1H06)

La chute : donnée inexorable. Équilibre et stabilité ne sont que des illusions créées par nos neurones pour se libérer d'une réalité physique qui nous entraîne toujours plus loin, un mouvement perpétuel ignoré de tous - chute de l'univers vers l'infini, des galaxies vers les bords de l'univers, du soleil vers le centre de sa galaxie, de notre planète vers le soleil, des électrons de notre corps vers le coeur du noyau atomique.

Intense vertige d'une cascade d'équilibres précaires, provisoires, la tête "tourne" - lueur de lucidité malgré l'apparente métaphore - et je sens le réel vaciller en moi. 

Sur une plage vide baignée de particules élémentaires, tombant vers l'entropie finale, j'ai vidé mon espoir de foi. Subissant les transformations irréversibles de la matière avançant comme une armée sans mémoire, j'ai accepté l'évolution inéluctable vers le chaos. 

L'infini ne promet que la désolation. Cette loi implacable transpire dans notre peur instinctive du "paradis" et de sa promesse d'éternité. Nous sentons que rien ne saura résister à l'attraction du froid qu'est l'entropie infinie, ce baiser de la mort. Auprès de corps rigides nous avons deviné l'instant où la lutte apparaît dans sa vanité et où les yeux se ferment pour ne plus rien savoir.

Symphonie solaire : triomphe du silence de la lumière. (16/10 17.03)
Arrive une ère d'espoir. Celle où le feu d'artifice initial affiche l'apparente réalisation de sa prophétie ; des motifs apparaissent de toute part, conjectures aléatoires dont on veut tirer un dessein. 

Il survient une possibilité de stabilité par-delà les ailes, de racines sous le dépaysement. J'oublie les repères arrachés de mon enfance et aspire à la construction. Je regarde ceux qui poursuivent leur course sans but avec une tendresse teintée d'envie. L'espace d'une respiration, je crois pouvoir abolir la fin en cessant de vivre dans des bulles d'espace-temps éphémères.

Bouleversé par le souvenir du parfum de l'air au matin d'hiver, dans un bois. (12/03 8.45)

Mes souvenirs ressemblent au Costa Rica, où je ne suis jamais allé. Car n'est-on pas aussi étranger à soi-même que les autres l'étaient à nous à l'époque ?Les années permettent progressivement de se débarrasser des idées et sentiments inscrits en nous par les circonstances, pour retrouver progressivement les contours flous de la personne que nous pourrons devenir. Ce que les autres voyaient alors, ce n'était que de la peau appelée à flétrir, et regarder dans nos mémoires ne donne pas plus d'informations sur nous qu'il est possible de reconstruire une silhouette à partir de poussière de peaux mortes. Toute perspective est faussée par le présent ; tant mieux. Le sentiment d'impatience qui nous gagne parfois à l'idée de la lenteur cosmique n'est rien en comparaison de la frustration qui serait la notre si nous pouvions objectivement regarder celui que nous appelions "moi" encore récemment, et qui a pris tant de nos années.

Elle sentait la jeune fille au matin d'une nuit à danser. (20/03 8.34)
Nue la nuit, mèches emmêlées sur la moiteur de l'oreiller, celle que l'on n'appellera plus fille s'ennuie. Une fenêtre ouverte sur la baie apporte des secousses de vie indiscernables - rires, peurs, chants, heurts. De sa vie en pointillés sur la mappemonde, que reste-t-il ? Des photographies, des instantanés numériques partagés avec ses contacts virtuels, des impressions fugitives de liberté et de solitude. Pour rien au monde elle ne remettrait en question sa religion : "plus loin, toujours". Lors de ses moments de tendresse, elle regarde ses ballerines plutôt que le monde autour, et alors elle pourrait être n'importe où, n'importe quand. 
Une femme qui pleure rappelle toutes celles que l'on a fait pleurer. (7/03 17.56)
Je suis l'être humain infaillible. Celui qui a commis toutes les erreurs afin d'accomplir son programme génétique. Au seuil de la dématérialisation, mes connexions neuronales s'effritent docilement. Les derniers mouvements atomiques m'apportent une poignée de secondes supplémentaires et je contemple d'un seul regard l'intégralité de l'Univers disparaissant. Il ne reste plus assez d'énergie pour produire la nostalgie de mon enfance et de celle du monde. Je sens la vie me quitter à chaque mouvement d'électron. Je songe à la création, cette explosion de joie primordiale, et la dernière larme disparaît de ma joue, emportée dans l'obscurité. Des étoiles par galaxies entières, des nuages de gaz intersidéraux, du vivant à déborder du monde, tant de transformations majestueuses pour en arriver là.
Quand soudain, au loin, une lumière…
None of this works - it's just a filler
To the infinite (5/04 21.46)