2 septembre 2011

Sincérité


Je n'aurais pas pu m'ennuyer davantage. L'inactivité cérébrale avait tranquillement transformé ce que les biologistes nomment généreusement mon "cerveau" en une sorte de soupe tiède.

Cette fille qui me plaisait ne faisait qu'émettre des signaux contraires me contrariant fortement. Je ne parvenais pas à déterminer si elle était totalement insensible à ma présence, ou simplement timide, ou peut-être déjà en couple. J'avais déjà tenté de l'inviter à sortir, de la seule manière que je connaisse (détournée et faussement désintéressée), mais elle avait refusé en prétextant une sortie prévue avec des amis. Mensonge ou vérité, je n'en saurais rien mais cela m'empêchait de lui redemander une nouvelle fois. J'étais donc coincé, par orgueil et peur de l'échec, dans une position d'attente qui m'amenait à rester derrière mon ordinateur toute une heure supplémentaire en espérant qu'au moment de partir du bureau, elle m'inviterait à aller boire un verre.

Le moment est arrivé : elle s'est levé, m'a poliment souhaité un bon weekend, et est partie en me laissant seul avec mes tergiversations qui tourneraient bientôt en désolation pure et simple.

Incapable de sortir pour oublier, je m'en retournais chez moi pour m'abrutir un peu plus devant des programmes télévisés, jusqu'à ce que le sommeil m'attrape pour me projeter dans des rêves où je serais tout aussi impuissant et passif face à cette fille. Mes fantasmes conscients sont si débridés que je m'interroge souvent sur la raison de la mièvrerie de mes rêves. Là où je pourrais saisir chaque occasion et assouvir mes envies, je me révèle exactement comme au quotidien : un garçon peureux incapable d'initiatives affectives. On pourrait "glorifier" cette pudeur en mauvaise maladie de "fleur bleue", mais la réalité est plus pathétique : mon inactivité sexuelle n'a rien d'idéaliste ou chevaleresque : elle est subie.

Le seul aspect positif de mon retour prématuré à la maison (pour un vendredi soir) était de pouvoir changer de chemise : l'alcool de ma cuite d'hier avait parfumé ma peau d'eau de sueur âcre. Je me sentais comme Michel Houellebecq, le talent en moins.