24 avril 2009

Absolument

Il se regarde beaucoup. Non pas qu’il s’aime démesurément, il est simplement conscient de son apparence et de l’importance qu’elle emporte dans le monde.

Il est parfois jaloux de lui-même, d’une mèche particulièrement bien placée sur une photo d’hiver, ou d’un regard malin dans un miroir de restaurant. Son image n’est pas qu’un reflet, elle vit indépendamment de lui.

Il ne sera jamais ami avec quelqu’un qui s’appelle Roy ; pour un garçon ou une fille, ce prénom est ridicule. Il aime critiquer les gens car ils n’existent que par lui. Ce n’est pas pour grandir son prestige, immense déjà, plutôt par altruisme. Il dit souvent des choses qui ne semblent pas avoir de sens, comme un défi à la logique et ses raisonnements absurdes.

Sur la glace lisse du restaurant 3 étoiles, il dessine parfois des moutons. Ou peut-être sont-ce des nuages, mais personne ne l’a informé de la différence. Les bulles de sa bière ressemblent à celles de son champagne, mais sa chemise sur mesure n’a rien à voir avec les fripes qu’arborent les marchands d’espace ventant leur supplément hebdomadaire comme une nouvelle venue du Christ sur terre.

Il écoute le papier journal crisser sous les doigts de la nymphe nubienne qui prépare son café, et se répète que le monde n’existe que pour son plaisir périssable. Il pense des phrases définitives. Sur la place enfumée.

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